Introduction à La pleine conscience

Rumination, anticipation, scénarios catastrophes, pensées répétitives et intrusives… Toutes ces pensées, devenues automatiques, envahissent n’importe quel moment de la journée. Lorsqu’elles se manifestent, il devient difficile de s’en débarrasser. On peut tenter de penser à autre chose ou de détourner son attention dans l’espoir de faire taire ce dialogue interne, mais lutter contre ces automatismes est souvent épuisant et infructueux. Ces pensées automatiques, envahissantes ou répétitives, reflètent une rupture avec le présent, marquée par la rumination d’un événement passé, des pensées incontrôlées ou une anticipation excessive du futur. La méditation de pleine conscience constitue une réponse efficace pour réduire l’impact des commentaires mentaux qui exacerbent les émotions négatives. Initialement développée pour prévenir les rechutes chez les personnes souffrant de dépression majeure, la pleine conscience s’avère particulièrement utile pour contrer les ruminations, lesquelles amplifient les humeurs et pensées négatives, contribuant ainsi au maintien des symptômes dépressifs. Cette approche peut également être transposée aux troubles anxieux, caractérisés non seulement par des ruminations, mais aussi par des pensées envahissantes, souvent de nature anticipatrice ou obsessionnelle.

La pleine conscience

Jon Kabat-Zinn, qui a été un pionner dans la réduction du stress basée sur la pleine conscience (MBSR, mindfulness-based stress reduction), définit la pleine conscience (mindfulness) comme étant la prise de conscience qui se développe en prêtant attention de façon délibérée au moment présent sans jugement de valeur. Cette pratique favorise une prise de conscience plus affuté des sensations corporelles, de perceptions, des pensées et des émotions sans porté de jugement de valeur et réaction affective. La pleine conscience est intentionnelle c’est-à-dire qu’elle est obtenue par l’attention que l’on porte délibérément dans l’instant et sans jugement aux choses telles qu’elles sont et non telle que nous voudrions qu’elles soient. En somme, la pleine conscience est une expérience directement centrée sur le moment présent.
Prenez un instant pour ressentir les tensions au niveau de votre nuque, de vos épaules, du bas de votre dos. Prenez un instant pour ressentir la gravité, le poids de votre corps qui vous rattache à la terre. Prenez également un instant pour percevoir ce qu’il se passe autour de vous, qu’il s’agisse d’un calme absolu ou de présences qui vous entourent. Vous vous êtes peut-être jugé à l’idée que votre attention s’est portée sur autre chose que ce qui était suggéré dans le texte ? Avez-vous ressenti de la frustration ? Prenez-en simplement note et acceptez que cette émotion ait fait irruption dans l’instant présent. La pleine conscience ne consiste pas à faire le vide, car cela est impossible. Il s’agit d’accueillir les choses telles qu’elles sont, plutôt que comme nous voudrions qu’elles soient. Si un nuage apparaît dans un ciel bleu, il serait contre-productif de chercher à le faire disparaître.
La pleine conscience est une pratique qui nous invite à modifier la perception des informations qui nous entourent, ainsi que de ce que nous ressentons. Safran et Segal (1990) considèrent la pleine conscience comme l’adoption d’une perspective de décentration vis-à-vis des pensées, des sensations et des émotions, permettant ainsi de les expérimenter dans leur subjectivité et leur nature transitoire. Il ne s’agit pas de savoir pourquoi nous sommes tristes ou déprimés, mais d’appréhender ces émotions négatives comme des instants passagers, comparables à ce nuage qui apparaît dans le ciel et qui finira par passer.

Le mode « faire » et « être »

Si la pleine conscience est intentionnelle, c’est parce qu’elle implique un changement de mode. Notre cerveau fonctionne à un niveau olympique dans ce que l’on appelle le mode « faire ». Ce mode « faire » est orienté vers un but, très utile au quotidien pour résoudre des problèmes. Notre attention se concentre alors sur la réduction de l’écart entre notre situation actuelle et celle où nous souhaitons être, dans le but d’atteindre un objectif. Par exemple, si je suis chez moi et que je dois me rendre à un rendez-vous, je déclenche alors une série d’actions et d’anticipations pour arriver à l’heure, tout en analysant les moyens de réduire l’écart entre mon point de départ et ma destination. Dans ce mode, les décisions et les sentiments sont évalués en termes de « bonnes » ou de « mauvaises » choses. L’esprit oscille entre les expériences du passé et les anticipations du futur pour atteindre un but. Si je dois honorer un rendez-vous pendant les heures de pointe, je puise dans mes expériences passées des informations sur la circulation et j’anticipe toutes les variables susceptibles de compromettre mon objectif. En cas de mauvaise décision due à un imprévu, des émotions fortes peuvent nous envahir et être perçues comme une « mauvaise chose » pour atteindre notre but. Il en va de même pour les émotions : si je suis un peu fatigué.e sans en avoir conscience et que je partage un moment avec une personne que j’apprécie, dans un cadre idéal, puis que je ressens des émotions négatives (dépression, anxiété…) en raison de mon état physique, je pourrais penser qu’il n’est pas normal de ne pas ressentir de bonheur. Comparer ce que nous éprouvons à ce que nous aimerions ressentir, surtout en matière d’émotions, est contre-productif et exacerbe les émotions négatives. C’est pour cette raison qu’il est difficile de résoudre des émotions comme des problèmes.
Le mode « être » repose sur l’idée que les choses sont directement expérimentées par les sens. Il s’agit d’une attention portée sur l’instant présent, favorisant l’acceptation inconditionnelle de l’expérience actuelle (émotions, pensées, sensations…). Le mode « être » s’oppose ainsi au mode « faire ». Grâce à la pleine conscience, il s’agit d’apprendre à observer nos pensées, sensations et émotions comme des événements mentaux qui surgissent naturellement, restent un instant, puis s’effacent.

Invitation au « Ici et maintenant »

Je vous propose maintenant d’expérimenter la pleine conscience dans des moments qui favorisent l’éveil des sens. Cela peut se faire, par exemple, lors d’un repas. Prenez le temps d’observer votre assiette, de contempler les couleurs des aliments, de sentir les différents parfums qui se mêlent, de ressentir le poids de la fourchette et la sensation du contact sur votre peau, de prendre conscience de la salivation, et ainsi de prendre pleinement conscience de l’expérience sensorielle de goûter un aliment. Cela peut aussi se faire sous la douche, en ressentant l’écoulement de l’eau sur votre peau, la température, le bruit de l’eau, ou encore en appréciant le parfum du savon… Si vous expérimentez le mode « être », il sera inévitable que votre attention dérive vers des pensées du mode « faire ». L’essentiel est simplement d’en prendre conscience sans jugement et d’accepter ces événements mentaux tels qu’ils sont, sans chercher à les modifier. Cultiver le « ici et maintenant » est une pratique qui nécessite l’acceptation de ne pas toujours y parvenir. Il suffit de noter, sans jugement, que notre esprit a momentanément quitté l’instant présent.

Cet article est une invitation à la pleine conscience, il ne s’agit pas d’une explication exhaustive. Pour aller plus loin et mieux s’approprier cette pratique je vous conseil ce livre: : Méditer pour ne plus déprimer—Éditions Odile Jacob. (s. d.). https://www.odilejacob.fr/catalogue/psychologie/developpement-personnel/mediter-pour-ne-plus-deprimer_9782738153913.php

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